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Le cannabis, une drogue aux vertus thérapeutiques


Drug Abuse

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Le cannabis, une drogue aux vertus thérapeutiques
LE MONDE | 11.12.09 | 14h43  •  Mis à jour le 13.12.09 | 09h18

Atteint d'une sclérose en plaques, Olivier, 50 ans, fume quotidiennement du cannabis
pour soulager ses douleurs et les effets secondaires liés à son traitement, une
injection hebdomadaire d'Interféron bêta 1-a. "C'est très efficace contre les nausées
et pour donner de l'appétit,explique-t-il. Sans cela, je ne serais pas capable de sortir.
Et puis, ça me maintient le moral." Le 26 août, les gendarmes ont fait irruption dans
sa maison du Lot et ont saisi ses plants. Olivier, qui a été condamné à 150 euros
d'amende avec sursis, ne décolère pas : "Je ne suis ni un dealer ni un toxicomane, et
le cannabis m'aide bien davantage que les traitements classiques contre la douleur.
Je n'ai pas envie de finir en fauteuil roulant."

En France, le cannabis est une drogue illicite, qu'il s'agisse d'usage récréatif ou
thérapeutique. Nicolas, un Luxembourgeois ancien inspecteur de police, n'a pas ces
soucis. Son médecin hollandais installé en Allemagne lui prescrit du Bediol, des fleurs
de cannabis sous forme de poudre, qu'il va acheter aux Pays-Bas à la pharmacie
Hanzeplein de Goningen. "J'en prends juste le soir dans un thé de chanvre. Je
souffre d'un syndrome de trouble de l'attention avec hyperactivité (TDAH) et ça a
changé ma vie", témoigne cet homme de 54 ans qui ne supportait pas le
méthylphénidate prescrit pour ce genre de syndrome.

Contrairement à leurs homologues français, depuis 2003, les médecins néerlandais
peuvent prescrire librement du cannabis, sous sa forme naturelle, aux personnes qui
souffrent de certaines pathologies. "Des données cliniques, qui demandent à être
complétées, ont montré l'efficacité de cette thérapeutique notamment pour lutter
contre la douleur dans la sclérose en plaques et certains cas de myopathies ou de
cancers, la perte d'appétit dans les chimiothérapies et, de manière plus spéculative,
pour aider les personnes atteintes de TDAH", explique Marco Van de Velde, directeur
de l'Agence du cannabis médical des Pays-Bas. Créé en 1998 sous la pression des
associations de malades atteints de sclérose en plaques, cet organisme placé sous la
tutelle du ministère de la santé contrôle la production de cannabis et est seul habilité
à le vendre aux pharmacies. Trois produits sont délivrés dans les officines, avec
différents dosages en tétrahydrocannabinol (THC) et en cannabidiol (CBD) qui n'est
pas psychoactif et présente l'avantage d'atténuer les éventuels effets secondaires liés
au THC (ivresse, anxiété, fatigue...). "Il est recommandé de ne pas fumer le
cannabis, car les produits de la combustion sont nocifs, poursuit Marco Van de Velde.
On peut le consommer en thé ou l'inhaler avec un vaporisateur." 500 patients
s'approvisionnent dans les pharmacies, les autres leur préférant les coffee-shops où
le produit, encore peu remboursé par les compagnies d'assurances, est moins cher.

Le Canada et quatorze Etats américains autorisent également la consommation du
cannabis pour des raisons thérapeutiques, faute d'alternative et sur prescription d'un
médecin ou autorisation spéciale. A côté de la prescription de marijuana, il existe sur
le marché des médicaments à base de cannabis. Là encore, Etats-Unis et Canada
font figure de précurseurs. Ils ont autorisé la prescription du Marinol et de Césamet
(tétra-hydrocannabinol ou THC de synthèse) pour traiter nausées et vomissements
associés aux chimiothérapies anticancéreuses et contre les pertes d'appétit chez les
personnes atteintes du sida. Au Canada, le Sativex est autorisé depuis 2005 pour
lutter contre les douleurs spastiques de la sclérose en plaques. Il associe deux
cannabinoïdes, le THC et le CBD. Des demandes de mise sur le marché sont en cours
en Espagne et en Grande-Bretagne, où il est déjà délivré sur autorisation spéciale.
Selon le laboratoire Meda, qui distribue le Cesamet en Europe et aux Etats-Unis, il est
également prescrit en Grande-Bretagne, Irlande, Finlande et Espagne, selon des
procédures particulières.

En France, la réglementation permet, sous certaines conditions très restrictives, la
délivrance de médicaments cannabinoïdes. Les médecins doivent faire une demande
d'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) auprès de l'Agence française de sécurité
sanitaire des produits de santé (Afssaps). Depuis 2001, seules 90 ATU ont été
accordées pour des prescriptions de Marinol, principalement pour des nausées liées
aux chimiothérapies, des séquelles d'affections inflammatoires du système nerveux,
ou encore des problèmes d'inappétence liés au sida. "Nous délivrons des ATU
nominatives dans le cadre de pathologies graves ou rares lorsqu'il n'y a pas
d'alternative thérapeutique et nous avons très peu de demandes de renouvellement",
précise-t-on à l'Afssaps. "Ces procédures, longues et compliquées, découragent les
prescripteurs, considère Bertrand Lebeau, médecin addictologue. Il m'est arrivé d'en
demander à plusieurs reprises mais je suis rarement allé jusqu'au bout. Il faut
démontrer que toutes les possibilités ont été utilisées auparavant."

"La France accuse un retard de quinze ans. Il y a urgence à mettre en place un
cadre permettant aux malades d'avoir accès à toutes les thérapeutiques à base de
cannabinoïdes (Sativex, Dronabinol) et au cannabis sous sa forme naturelle", plaident
les associations Act-Up Paris, SOS-hépatites, Anitea (Association nationale des
intervenants en toxicomanie et addictologie) et ASUD (Autosupport des usagers de
drogue). Elles demandent l'arrêt des poursuites judiciaires pour ceux qui utilisent ou
cultivent le cannabis à des fins médicales.

Cannabis en médecine, du docteur Franjo Grotenhermen, président de l'Association
allemande pour le cannabis médical. Editions Indica, 211 p. 24,90 €.

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Cannabis thérapeutique : "Il serait temps de quitter le champ de la polémique"
LEMONDE.FR | 11.12.09 | 13h51

mi07 : Une personne qui est polytraumatisée à cause d'un accident sur la voie
publique, a des douleurs permanentes au dos. Cette personne est sous morphine et
fume du cannabis en expliquant que cela lui calme la douleur, ma question est : à
partir de quelle quantité cela devient une drogue ?

Bertrand Lebeau : Le fait qu'une substance soit considérée comme une drogue ne
dépend pas des quantités. Bien entendu, la toxicité d'une substance qu'on peut
considérer une drogue est dans les quantités. Et on ne peut pas dire : en deçà d'une
certaine quantité, le cannabis n'est pas une drogue, et au-delà, c'en est une. Il n'y a
donc pas vraiment de réponse à votre question, parce que le statut de drogue, ou
pour utiliser un mot plus compliqué, de substance psychoactives, dépend des
propriétés de cette substance.

anthony38 : Pourquoi le cannabis n'est-il pas reconnu en France alors que les pays
d'Europe s'en servent déja, ainsi que 13 Etats américains ?

Ce n'est pas simple. C'est vrai qu'il y a un certain nombre de pays européens et
d'Etats des Etats-Unis qui permettent l'accès à du cannabis thérapeutique. En
insistant sur un point important : aujourd'hui, il est très difficile de considérer qu'un
médicament puisse se présenter sous une forme fumable. Car la fumée de cannabis,
même s'il n'y a pas du tout de tabac, en particulier lorsque le cannabis se présente
non pas comme résine, mais comme herbe, cette fumée présente pour les bronches
et les poumons une toxicité au moins égale à celle de la fumée du tabac,
probablement supérieure. Cela veut dire qu'une personne peut parfaitement fumer
du cannabis avec un objectif qui n'est pas récréatif, mais thérapeutique. Par exemple
fumer du cannabis non pas pour ressentir l'effet de "high", d'ivresse cannabique,
mais pour être soulagée d'une douleur. Mais pour que le cannabis se présente
comme un médicament, a priori, il ne doit pas se présenter sous une forme fumable.

Dans les pays qui ont mis en place un accès au cannabis thérapeutique, il peut se
présenter sous forme de gélule, contenant souvent du principe psychoactif ­ le THC
(tétrahydrocannabinol), parfois avec d'autres cannabinoïdes. Il peut aussi se
présenter comme un spray, et il existe un médicament, le Sativex, qui est un spray
qui contient du THC et un autre cannabinoïde, le CBD (cannabidiol).

Je dirais donc que la principale raison pour laquelle en France et dans un certain
nombre d'autres pays l'accès au cannabis thérapeutique est si restrictif, c'est la
crainte que le cannabis thérapeutique ne soit le cheval de Troie du cannabis
récréatif. C'est-à-dire qu'en réalité, derrière un prétexte thérapeutique se cache la
volonté de rendre légale la consommation de cannabis récréatif.

Lucas : La recherche médicale sur le cannabis est-elle permise en France? Il me
semble que la recherche sur cette substance est interdite depuis 1974 par la loi. Y-a-
t-il eu des évolution depuis ?

Non, les recherches sur le cannabis ou sur les cannabinoïdes ne sont pas interdites
en France. Mais ce n'est pas parce qu'elles ne sont pas interdites qu'elles sont
largement développées.  Il y a deux volets à cette question : le premier concerne
plutôt la recherche fondamentale. Et dans le champ de la recherche, les chercheurs
peuvent avoir accès à toutes sortes de substances, y compris, lorsqu'ils le
demandent, et même si les procédures sont compliquées, à des drogues illicites.
Sinon, il ne serait pas possible de faire des recherches en utilisant l'héroïne ou la
cocaïne ou la MDMA (principe actif de l'ecstasy). Deuxième volet, qui relève plutôt de
la recherche appliquée ou de la recherche pharmaceutique : il consiste à mettre au
point des médicaments qui sont issus du cannabis. Il est vrai que concernant ce
deuxième volet, il y a des pays beaucoup plus dynamiques que la France. On peut
citer la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, par exemple.

Richard : Bonjour, lorsqu'en France des malades du cancer entendent que dans
d'autres pays les malades sont soulagés par le cannabis, et qu'ils sollicitent les
médecins, quelle est la réponse de ces derniers ?

La plupart des médecins français, la très grande majorité, ignorent qu'il est possible
pour un médecin hospitalier ­ c'est une première limite ­, et dans un cadre très
contraignant, de demander à une instance administrative l'autorisation de prescrire
du THC. Mais il y a actuellement en France environ 80 personnes qui ont légalement
accès à du THC par ce dispositif. C'est évidemment très insuffisant.

Guest : Est-ce que le cannabis consommé régulièrement est un bon remède à
l'anxiété et au stress quotidien ?

Ce n'est pas facile de répondre à cette question. L'une des raisons qui peuvent faire
arrêter la consommation non pas de cannabis, mais de THC, c'est précisément que
cela peut provoquer des anxiétés. C'est "anxiogène", comme on dit. Cela dépend
beaucoup des personnes, et du contexte dans lequel la substance est consommée.

Par exemple, la plupart des usagers de cannabis récréatif savent que lorsqu'ils vont
mal parce qu'ils sont anxieux ou déprimés, la consommation de cannabis ne va pas
nécessairement améliorer leur état. Il arrive même qu'elle l'aggrave, et c'est ce que
les usagers appellent un "bad trip". Donc il n'y a pas de réponse simple à cette
question. Le cannabis peut diminuer l'anxiété, comme il peut l'augmenter.

Staupe : Le cannabis et/ou le THC ont-ils sur le plan thérapeutique une propriété qui
leur est propre par rapport à d'autres médicaments "standards", justifiant ainsi leur
utilisation en propre et non celle de succédanés ?

La réponse est oui. Il y a une modalité d'action spécifique aux cannabinoïdes, aux
substances psychoactives qui se trouvent dans le cannabis. Le cannabis est une
substance complexe, comme la fumée de tabac. Ces substances agissent sur des
récepteurs, comme des serrures, le cannabis étant une clé, récepteurs tout à fait
spécifiques. Donc il y a bien un mode d'action qui est spécifique au cannabis et aux
cannabinoïdes.

Marie : Le cannabis est-il efficace contre l'asthme ?

La réponse est oui, le cannabis peut-être efficace contre l'asthme, avec un facteur
limitant : la fumée de cannabis est évidemment un facteur irritant pour les bronches
et les poumons. Mais il y a effectivement une activité du cannabis contre l'asthme, en
particulier par bronchodilatation.

isidor : Quels sont selon vous les exemples internationaux les plus intéressants quant
à la médicalisation du cannabis ?

Un certain nombre d'Etats américains se sont engagés dans la voie du cannabis
thérapeutique. Il y a deux grands modèles : un modèle dans lequel des médecins
remettent à un patient un certificat attestant que le cannabis pourrait soit améliorer
son état de santé, soit soulager un certain nombre de symptômes. Munies de ce
certificat, les personnes peuvent aller dans ce que les Américains appellent un
"cannabis buyer's club", un club d'acheteurs de cannabis, et avoir accès à du
cannabis qu'ils vont fumer, le plus souvent. C'est le modèle par exemple qui prévaut
à présent en Californie.

Il y a des modèles beaucoup plus médicalisés, comme le modèle néerlandais : il y a
une instance de régulation du cannabis thérapeutique, des médecins qui prescrivent
des cannabinoïdes qui se présentent sous forme de gélules, de sprays, sous toutes
formes de galéniques non fumables.

Pascal : A quand une volonté européenne pour uniformiser un usage thérapeutique
du cannabis ?

Quand ? Je ne peux pas répondre. Mais il est certain que ce serait heureux qu'un
certain nombre de pays européens s'entendent pour avoir un cadre légal semblable.
Cela veut dire au moins trois choses :  on développerait les essais cliniques dans
plusieurs pays européens ; on construirait une liste de maladies dans lesquelles le
cannabis pourrait avoir un intérêt médical ; il y aurait une formation des médecins à
la prescription des médicaments issus du cannabis. Je pense que cela se terminera
probablement comme cela. Mais quand ? C'est plus compliqué à dire.

charlotte : Pour quels symptômes prescrit-on la consommation de cannabis ?

Il y a un certain nombre d'indications à peu près consensuelles. La première porte
sur le fait que le cannabis soulage, et même parfois interrompt, les nausées et les
vomissements provoqués par les chimiothérapies anticancéreuses. Le cannabis est un
excellent antiémétique, efficace contre les nausées et les vomissements. Le cannabis
a des propriétés de stimulation de l'appétit, "orexigènes". Il peut être utilisé par
exemple par des personnes qui sont infectées par le VIH, pour avoir de l'appétit.
Autre grande indication du cannabis : les maladies neurodégénératives. Par exemple,
la sclérose en plaques. Le cannabis peut soulager les douleurs et les contractures
liées à ce type de maladie. Le cannabis peut être efficace contre une maladie de l'œil
qui s'appelle le glaucome, parce qu'il a la propriété de diminuer la pression intra-
oculaire.

Nydyla : J'ai fait trois tentatives de suicide il y a plus de 10 ans, les médicaments me
rendaient sans réaction. J'ai essayé le cannabis par hasard et j'ai arrêté ces
médicaments. Cela m'a beaucoup aidée à m'en sortir et cela ne pas rendu
dépendante du cannabis. J'ai arrêté sans problème contrairement aux médicaments,
avec lesquels j'avais des accès de colère. Pourquoi les autorités ne testent-elles pas
ce moyen sur des patients atteints de dépression ?

C'est un témoignage intéressant qui ne suffit pas à faire une indication. On a besoin
d'essais cliniques très contrôlés sur un grand nombre de personnes. Mais il est vrai
que quand on lit les témoignages de personnes qui affirment avoir eu recours au
cannabis avec succès, alors que des médicaments qui présentent des inconvénients
importants comme les antidépresseurs n'ont pas été efficaces, ou ont été peu
efficaces, on se dit qu'il serait temps de quitter le champ de la polémique pour entrer
dans celui de la médecine, qui est normalement plus apaisé.

bob : Est-ce que la consommation de cannabis peut entraîner une dépendance si ce
n'est physique, au moins psychologique ?

La réponse est oui. Le cannabis, comme beaucoup d'autres substances, peut
parfaitement entraîner une dépendance psychologique. Concernant la dépendance
physique, les avis peuvent diverger, mais il y a tout de même un consensus pour
considérer que la dépendance physique au cannabis est relativement faible. En tout
cas, bien moins importante que celle que provoquent l'alcool ou l'héroïne, ou les
benzodiazépines, qui sont très utilisés contre l'anxiété, par exemple. Et un rapport
publié en 1998 qui avait fait couler beaucoup d'encre, le rapport du Professeur
Roques sur la dangerosité des drogues, mettait le cannabis à une place particulière à
cause de sa faible toxicité.

Ghislain : J'ai consommé du cannabis pendant plusieurs années pour son effet
récréatif. Je n'en consomme plus et je pense que cet effet est nuisible. Si je venais à
consommer du cannabis dans un cadre thérapeutique, serait-il possible de bénéficier
des avantages du produit, sans subir... appelons ça la "défonce".

Excellente question. La réponse est actuellement non. Et je voudrais donner un
exemple : il y a un très grand biologiste américain, Stephen Jay Gould, qui a été
victime d'un cancer et qui a subi une chimiothérapie, qu'il supportait extrêmement
mal. C'est par ailleurs quelqu'un qui ne supportait pas d'être sous l'influence d'une
drogue, par exemple l'alcool ou le cannabis. Mais il a consommé du cannabis pour les
effets contre les nausées et les vomissements dont je parlais tout à l'heure, et pour
lui, l'effet "défonce" du cannabis était un effet secondaire gênant. Actuellement, on
n'a pas les moyens de séparer les effets thérapeutiques recherchés de l'effet
"défonce".

Fred : Que sait-on quantitativement des troubles du comportement, des bouffées
délirantes, anxiétés et autres "désagréments" par rapport aux effets bénéfiques dont
vous parlez ? Peut-on faire la part des choses, trancher ?

Ce n'est pas une question facile. Il y a beaucoup de discussions sur les liens entre
consommation de cannabis et troubles mentaux. Certains médecins pensent que le
cannabis peut à lui seul provoquer des troubles mentaux graves. D'autres médecins
pensent plutôt que le cannabis peut révéler des troubles mentaux préexistants. Mais
que le cannabis crée des troubles ou qu'il les révèle, on sait que la plupart des
usagers récréatifs réguliers ont au moins une fois eu un épisode d'anxiété aiguë,
voire un trouble plus grave. Chez les personnes qui ne présentent pas de pathologie
mentale, le risque de voir un épisode d'anxiété aiguë apparaître est assez faible. Mais
il existe.

JP : Quel est la position actuelle de la communauté scientifique concernant l'utilisation
thérapeutique du cannabis (pour, contre, pas de consensus ou besoin d'études
complémentaires) ?

Il n'y a pas de consensus. Et la raison, me semble-t-il, en est que la question du
cannabis thérapeutique reste une question très polémique. Entre ceux qui sont
scandalisés qu'on ne puisse pas avoir accès à un médicament aussi efficace, et ceux
qui sont persuadés que le cannabis thérapeutique est le faux nez du cannabis
récréatif, il ne peut pas y avoir de consensus. Le fossé est trop large.  Et pourtant, si
l'on veut que le cannabis thérapeutique occupe sa place, rien que sa place mais
toute sa place, dans l'arsenal thérapeutique, il faudra bien qu'on aboutisse à un
consensus.

Il faut savoir qu'en médecine, qui est une activité qui se situe entre science et art, les
consensus changent. Pas tous, peut-être, mais beaucoup. Par exemple il y a encore
quelques années, les médecins français étaient très réticents à prescrire de la
morphine dans les douleurs intenses. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Donc les
consensus changent, et on a tout intérêt à ce que la question des propriétés ou des
utilisations thérapeutiques du cannabis soit posée de manière un peu moins
passionnelle et un peu plus sereine.

 

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